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Maman

Pas évident de parler de ce qui compte si intimement pour soi dans un blog mais vous le savez bien parler fait du bien.

Il y a un peu plus de 3 mois j'ai perdu ma mère et c'est un deuil sacrement important pour moi.
J'ai eu une mère juive, telle qu'on en parle dans les histoires drôles, pas ouvertement envahissante mais sacrément présente.

Elle avait choisi mon prénom 20 ans avant ma naissance, m'attendait comme le messie ( 2 fils avant moi) et ne me lâcha pas de toute ma vie.
Femme forte, manipulatrice, mélange à la fois de naïveté, de modernité malgré qu'elle m'aie eu à 40 ans, toujours dans la bonne humeur et l'humour, une sacré bonne femme d'une beauté en plus hors du commun qui n'est passé inaperçue pour personne tant de personnes l'ayant regrettée.

6 ans de psychothérapie pour me libérer à peu près de son emprise mais une fois sortie de chez le psy, une fois que j'ai compris le mécanisme et désirée une distance, il était trop tard, elle était âgée ( 84 ans) et je n'allais pas lui dire que je viendrais moins souvent pour mon propre salut....

Depuis l'age de 20 ans ,age de son veuvage, j'allais la voir tous les jours sinon elle ne parlait et ne voyait personne, amour passion, interdépendance, torture psychologique, seule la psychothérapie m'a permis de pardonner, elle n'avait pas conscience une seconde de ce qu'elle me faisait subir: le chaud, le froid, ce leitmotiv qui lui faisait dire inlassablement "seul l'amour entre une mère et une fille existe", phrase répétée à longueur de temps contre laquelle je luttais et qui au bout du compte m'a prise au piège.

Je suis persuadée qu'elle a tenue jusqu'à l'age de 94 ans pour continuer à être là pour moi, pour m'aider pensait elle. Elle était douce et gentille avec tous sauf bien souvent avec moi sans que personne ne s'en aperçoive, un otage dans ses filets, je n'ai pas su lutter.

Il a fallu qu'elle souffre de sénilité, enfin pas mal, pour que je puisse enfin passer la barrière et lui témoigner de la tendresse au cours des 3 derniers mois, pour que je lui témoigne enfin de l'amour, caché au fin fond de moi dont je ne parvenais plus à avoir conscience, pour qu'une fois j'ai pu lui dire que je l'aime .

Et puis voilà, elle est partie! Difficile de commencer à se construire à 54 ans. Je suis partagée par un sentiment d'être grisée par une liberté dont j'ai toujours rêvée et le sentiment d'une moitié de moi qui m'a été arrachée, une impression de ne plus savoir quoi faire de moi.

Bien beau d'avoir quelques dons de ci et de ça et de ne rien sentir depuis son départ, du moins bien peu, j'ai bien ressenti sa présence par instant mais si peu et c'est si frustrant alors qu'à d'autres décès il y a quelques années, bien des choses étranges m'étaient arrivées.

Enfin voili, désolée de m'épancher ce soir, derrière toutes les couches, une fois l'oignon épluché ben oui, je l'ai aimée comme personne de toute ma vie...

Merci de votre écoute et je finirais par les paroles d'une chanson que j'ai beaucoup aimée, paroles d'un chanteur inconnu surement de vous puisqu'un chanteur catalan, une passion pour moi ce chanteur depuis plus de 30 ans, traduction d'une chanson qu'il a écrite lors du décès de sa mère, j'espère que vous aimerez (si vous me lisez un jour):


Un nuage blanc (un nuvol blanc) Lluis llach


La vie s'écoule tout simplement, elle arrive

Comme un écheveau que le vent décide,

Puis elle s'achève.

Parfois nous sommes acteurs

Parfois spectateurs,

Tout simplement, sans en avoir l'air

La vie nous donne un rôle puis nous le reprend.



La vague déferle sereinement, elle s'achève

Et dans l'abandon de sa défaite, elle renaît peut-être.

La plage amoureuse ignore la longue attente

Elle ouvre les bras :

La vague, aujourd'hui peut-être, restera.



Ainsi seulement je te laisse me quitter

Seulement ainsi, tu vas, je te laisse aller.

Pour toi je fais un nid dans l'arbre d'amour

Pour toi j'y pends là haut un nuage blanc,

Si blanc...
Si blanc...



Au coucher du soleil, souvent tu le regardes

Et lui, contrit, sait que meme s'il vieillit tu l'aimes.

Parfois nous arrivons trop tard

Et parfois sans savoir

L'art fragile d'un geste doux, je pourrais te dire que...


Seulement ainsi je te laisse me quitter

Ainsi seulement, tu vas, je te laisse aller.

Pour toi je fais un nid dans l'arbre d'amour

Pour toi j'y pends là haut un nuage blanc,

Si blanc...
Si blanc...

Pour toi je fais un nid dans l'arbre d'amour

Pour toi j'y pends là haut un nuage blanc,

Si blanc...